« Dans mon travail, j'échantillonne, j'extrais un évènement, un phénomène, une circonstance du quotidien et l'encapsule (le fait tenir) dans un espace. Cet échantillon, sujet du travail, fait partie d'un tout et son existence dépend des conditions présentes à l'instant de sa création. Il peut dépendre aussi bien de sa position géographique, spatiale et temporelle que matériologique, énergétique et climatique.
Aussi court, rare, anodin, évocateur ou invisible qu'est l'instant retenu dans le monde à un moment et quelque part, son déplacement dans l'atelier le taille, le tranche (coupe franche) pour ne garder qu'une séquence comparable à une essence.
Je traite le cas inenvisagé, comme une marche forcée d'une panne que nous aurions pris la peine de reconstituer et de régler dans les conditions sine qua non à sa bonne mal-fonction. Parfois le sujet retenu se trouve être une faille, un défaut, une erreur.
Le travail se forme et s'organise par des pressentiments et des intuitions autour de potentiels plastiques qui attendent la confirmation ou non de leurs efficiences dans le réel en vérifiant la faisabilité pratique et technique dans l''atelier. Ces matériaux me reviennent régulièrement à l'esprit par la force du quotidien mais ne véhiculent pas encore de couplages possibles ni une relecture de leurs capacités. C'est seulement lorsque les propriétés des produits, machines, organismes, minéraux et mots sont révélées et intégrées qu'il est possible d'envisager de créer une « sculpture », en tout cas un nouveau projet. Ces potentiels validés et acquis constituent par la suite une nouvelle bibliothèque de gestes et de matériaux qu'il est possible de mixer, ponter entre eux et ainsi d'en étendre et d'en renouveler leurs conditions. »